Le potassium, trop souvent négligé ?

Outre l’azote, le potassium (K) est l’élément fertilisant absorbé le plus abondamment par les cultures. Selon une étude publiée en 2013 dans le Agronomy Journal1, une culture de maïs produisant un rendement de 14.4 tm/ha (230 bu/ac) prélèvera du sol 286 kg/ha d’azote et 202 kg/ha de potassium. Faut-il s'inquiéter du fait que la fertilisation en potassium est souvent bien en-dessous de ce nombre ? Compte tenu que 14% de tous les échantillons de terre provenant de l’est du Canada analysés par le laboratoire A&L en 20212 sont à des niveaux de potassium considérés faibles à très faibles, il faut certainement s'y attarder un peu...

Rôle du potassium dans les plantes :

Le potassium est impliqué dans plus de 60 réactions enzymatiques qui sont nécessaires aux processus suivants : photosynthèse, synthèse et transport des sucres (remplissage des grains), croissance des racines, production de fibres, synthèse des protéines, etc. Il permet également une meilleure résistance de la plante à la sécheresse, aux insectes et aux maladies. Avec les changements climatiques à venir où les périodes de canicules seront plus nombreuses et plus longues, un niveau adéquat de potassium dans les cultures, ainsi qu’une bonne capacité du sol à retenir l’eau, les aidera à passer à travers ces variations de température.

On pense souvent que la verse est dû principalement à la variété. Bien que la génétique puisse effectivement avoir un impact sur l’incidence de la verse, le potassium joue également un rôle sur la tenue des plants. En vérifiant le niveau de potassium dans les sols afin de voir s'il est adéquat, il serait bon de jeter aussi un coup d'oeil aux analyses de manganèse et de cuivre, deux autres éléments qui influencent la verse !

Niveau dans les sols et disponibilité :

Le type de sol influence la quantité disponible et la réserve totale de potassium. Le K se répartit en trois « réservoirs » qui s'alimentent entre eux : le potassium de réserve, non disponible pour les plantes, constitue environ 90 à 98% du total et est contenu dans les minéraux du sol. La portion lentement disponible, parce que fixée à l'intérieur des feuillets d'argile, représente entre 1 et 10%, alors que la portion disponible et échangeable avec la plante ne représente que 0.1 à 2% du K total. C’est cette dernière portion qui est évaluée par les analyses de sol. Elles mesurent le potassium présent dans la solution du sol et sur les sites d'échange cationiques des particules de sol. Lorsque de la potasse est appliquée au champ, la quantité d’ions de potassium présents dans la solution du sol fait augmenter la quantité disponible sur le complexe du sol ; un équilibre se crée entre les deux milieux.

Besoins des cultures et courbes d'absorption :

De bonnes réserves de potassium dans le sol ne signifient pas qu'il sera disponible en quantité suffisante au bon moment pour la culture.

Dans le maïs, la demande en potassium augmente rapidement après le stade V6 pour atteindre 17 kg/ha/jour au moment de la sortie des croix, stade auquel 80% de la potasse nécessaire aura été absorbée. Au même stade, seulement 64% de l’azote aura été absorbé et son taux d’absorption maximum aura été de 12.3 kg/ha/jour.

Dans le soya, le taux maximum d’absorption du potassium est d’environ 1.9 kg/ha/jour et a lieu au stade R1(début floraison). Le plant aura accumulé 63% du potassium nécessaire à son développement au stade R4 (début remplissage).

Bilan minéral sur la ferme ou sur un champ : 

Les différents réservoirs et les phénomènes d'échanges de l'un à l'autre rendent la dynamique du potassium dans le sol assez complexe. Par contre, il est généralement convenu que pour ne pas appauvrir les sols, on devrait au minimum remplacer ce qui a été exporté par la récolte des grains ou la paille des cultures. Par exemple, pour contrebalancer ce qu’une récolte de 12.4 tm/ha de maïs exporte en potassium (62 kg/ha de K20), on devrait appliquer environ 103 kg/ha de muriate de potasse (0-0-60). Pour une récolte de soya de 3.7 tm/ha, la quantité exportée variera entre 82 et 89 kg/ha de K20 soit entre 137 et 148 kg/ha de 0-0-60. Si l’on cultive du blé et qu’on obtient un rendement de 5 tm/ha en laissant la paille au champ, l'exportation est de 28 kg/ha de K20, soit l’équivalent de 47 kg/ha de potasse. Par contre, si la paille est ramassée, c’est plutôt 127 kg/ha de K2O, soit environ 213 kg/ha de potasse que l’on devra retourner au sol. Pour ce qui est des plantes fourragères, les chiffres sont beaucoup plus élevés : un champ de luzerne avec un rendement de 10 tm/ha va exporter environ 250 kg/ha de K2O soit l’équivalent de 415 kg/ha de potasse.

Le potassium ne travaille pas seul :

Ratio N/K : Lorsque le potassium est en quantité suffisante dans la solution du sol, l'absorption de l'azote au niveau des racines est facilitée, la réponse à la fertilisation azotée est meilleure ; ces deux éléments travaillent également de concert dans le développement des cellules et la croissance des tissus. Des études américaines ont démontré que les hybrides de maïs modernes ont des besoins plus élevés en azote et en potassium. Selon ces études, le ratio N/K optimal au stade VT-R1 devrait se situer entre 1.4/1 et 1.6/1. Il serait donc intéressant de prendre des analyses foliaires à ce stade et de vérifier si notre fertilisation est bien balancée.

Ratio K/Bore : Le potassium et le bore travaillent ensemble au niveau du transfert des sucres dans la plante. Selon le laboratoire A&L, 85% des échantillons de sol analysés dans l’est du Canada ont un niveau faible à très faible en bore.

Ratio K/Mg : Ces deux éléments sont constamment présents dans la solution du sol et sont en compétition pour être absorbés dans la plante. Ainsi, un sol sableux faible en magnésium (mg) où l’on applique trop de potasse peut démontrer des signes de carence en Mg. À l’opposé, un sol très riche en magnésium sur lequel on n’applique pas assez de potassium peut, à moyen terme, démontrer des signes de carences en potassium. Les apports de l'un et l'autre doivent être ajustés en fonction des teneurs de chacun de ces éléments dans le sol.

En conclusion, rappelez-vous que le potassium est l'élément le plus utilisé en quantité après l’azote dans beaucoup de cultures. Afin d’éviter un appauvrissement des niveaux de potassium dans vos sols, prenez le temps de faire un bilan des apports et des exportations de cet élément sur votre entreprise. Vérifiez aussi que vous avez des niveaux de bore adéquats afin de maximiser l’utilisation du potassium par vos cultures. 

 

1Agronomy Journal (105 : 161-170)

2 A&L laboratories. AL Oct. 2021 Newsletter. Key trends from soil testing.

 

 

 

 

 


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